CAMPAGNE D'ÉGYPTE, Ire PARTIE.
Alexandre Berthier Jean-Louis-Ebenézer ReynierHuit jours avaient suffi à Bonaparte pour prendre possession de l'île de Malte, y organiser un gouvernement provisoire, se ravitailler, faire de l'eau, et régler toutes les dispositions militaires et administratives. Il avait paru devant cette île le 22 prairial; il la quitta le 1er messidor, après en avoir laissé le commandement au général Vaubois.
Les vents de nord-ouest soufflaient grand frais. Le 7 messidor, la flotte est à la vue de l'île de Candie; le 11, elle est sur les côtes d'Afrique; le 12 au matin, elle découvre la tour des Arabes; le soir, elle est devant Alexandrie.
Bonaparte fait donner l'ordre de communiquer avec cette ville, pour y prendre le consul français, et avoir des renseignemens, tant sur les Anglais que sur la situation de l'Égypte.
Le consul arrive le 13 à bord de l'amiral; il annonce que la vue de l'escadre française a occasionné dans la ville un mouvement contre les chrétiens, et qu'il a couru lui-même de grands dangers pour s'embarquer. Il ajoute que quatorze vaisseaux anglais ont paru le 10 messidor à une lieue d'Alexandrie, et que l'amiral Nelson, après avoir envoyé demander au consul anglais des nouvelles de la flotte française, a dirigé sa route vers le nord-est. Il assure enfin que la ville et les forts d'Alexandrie sont disposés à se défendre contre ceux qui tenteraient un débarquement, de quelque nation qu'ils fussent.
Tout devait faire craindre que l'escadre anglaise, paraissant d'un moment à l'autre, ne vînt attaquer la flotte et le convoi dans une position défavorable. Il n'y avait pas un instant à perdre; le général en chef donna donc, le soir même, l'ordre du débarquement; il en avait décidé le point au Marabou; il avait même ordonné de faire mouiller l'armée navale aussi près de ce point qu'il serait possible; mais deux vaisseaux de guerre, en l'abordant, tombent sur le vaisseau amiral, et cet accident oblige de mouiller à l'endroit même où il est arrivé. La distance de l'endroit du mouillage; éloigné de trois lieues de la terre; le vent du nord qui soufflait avec violence; une mer agitée qui se brisait contre les récifs dont cette côte est bordée; tout rendait le débarquement aussi difficile que périlleux; mais ces dangers, cette contrariété des élémens ne peuvent arrêter des braves, impatiens de prévenir les dispositions hostiles des habitans du pays.
Bonaparte veut être à la tête du débarquement; il monte une galère, et bientôt il est suivi d'une foule de canots sur lesquels les généraux Bon et Kléber avaient reçu l'ordre de faire embarquer une partie de leurs divisions qui se trouvaient à bord des vaisseaux de guerre.
Les généraux Desaix, Regnier et Menou, dont les divisions étaient sur les bâtimens du convoi, reçoivent l'ordre d'effectuer leur débarquement sur trois colonnes, vers le Marabou.
La mer en un instant est couverte de canots qui luttent contre l'impétuosité et la fureur des vagues.
La galère que montait Bonaparte s'était approchée le plus près du banc des récifs, où l'on trouve la passe qui conduit à l'anse du Marabou. Là, il attend les chaloupes sur lesquelles étaient les troupes qui avaient eu ordre de se réunir à lui; mais elles ne parviennent à ce point qu'après le coucher du soleil, et ne peuvent traverser le banc de récifs que pendant la nuit. Enfin, à une heure du matin, le général en chef débarque à la tête des premières troupes, qui se forment successivement dans le désert, à trois lieues d'Alexandrie.

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